Anne-Marie Laberge vice-présidente et le virage numérique de BRP en entrevue chez Infopresse

Catherine Martellini d’INFORPRESSE a réalisé cette excellente entrevue avec Anne-Marie Laberge, vice-présidente principale, marques mondiales et communications chez BRP

Après plus de 20 ans chez Telus, où elle a occupé divers postes de direction, Anne-Marie LaBerge a quitté l’univers des lapins et des caméléons de l’entreprise de télécommunications, pour celui des riders chez BRP. Mais la commande était titanesque. À son arrivée, le virage numérique marketing n’était encore qu’un projet.

Anne-Marie LaBerge est vice-présidente principale, marques mondiales et communications, depuis octobre 2016. En 2017, elle a remporté le prix d’innovation marketing du CMO Club.

Catherine Martellini  La transformation numérique est sur toutes les lèvres, quels ont été les principaux jalons de cette transformation?  

Anne-Marie LaBerge – Quand je suis arrivée en poste, la transformation n’était pas encore entamée, et sur le plan du marketing, c’était inexistant. La bonne nouvelle, c’est qu’on a bâti à partir de rien, et la mauvaise, c’est aussi qu’on a bâti à partir de rien.

«NOUS N’AVONS QUE 14 ANS, MAIS NOUS TRAÎNONS AVEC NOUS TOUT L’HÉRITAGE DE MARQUES ICONIQUES COMME SKI DOO, SEA DOO ET CAN-AM.»

Selon moi, trois ingrédients sont une nécessité dans cette odyssée qu’est une transformation numérique à l’intérieur d’une entreprise. Premièrement, il faut aller chercher les bons talents. On doit aussi trouver les bons systèmes, et c’est un far west quant à toutes les possibilités et les options offertes. Finalement, il faut une culture d’entreprise ouverte et flexible qui soutient ces transformations. Cela nécessite beaucoup d’agilité, et la recherche de bons talents est maintenant très ardue.

Comment avez-vous géré l’acquisition et l’intégration de ces nouveaux talents?

Nous avons créé le groupe Engagement consommateurs et stratégies de marque, responsable du parcours client avec à sa tête un ancien collègue qui a quitté Toronto pour s’installer avec nous à Bromont. Son mandat était de partir de zéro et de bâtir l’équipe, mais aussi les capacités pour amener la marque BRP dans le monde du numérique. Mais quand je parle de numérique, c’est à tous les niveaux, de la modernisation de nos sites web en passant par l’embauche de grandes pointures du marketing numérique, notamment en Europe, pour développer d’autres volets des systèmes numériques, par exemple, l’optimisation de recherche. Ce collègue est en poste depuis 11 mois, mais à ce jour, je dirais que 95% de l’équipe est en place. De plus, nous avons conclu un partenariat avec IBM et grâce à un plan approuvé par le conseil d’administration, tous les fonds ont été et autorisés pour cinq ans afin de bâtir nos capacités.

Quels ont été les principaux défis à l’interne pour une telle transformation?

Il y a cinq ou six ans, la plupart des fournisseurs automobiles avaient déjà fait la transition entre fabricant grossiste et vendeur au détail. Chez BRP, nous sommes en train de vivre cette transformation. Il y avait donc une nécessité importante de bâtir ce que j’appelle le dernier mille, soit de passer du détaillant au consommateur, puis d’amorcer une discussion avec lui. Chose que nous n’avions pas faite du tout auparavant, car nous nous arrêtions au détaillant.

«LE NUMÉRIQUE, AU FINAL, CE N’EST QU’UNE DES EXPRESSIONS DE LA FAÇON DONT UNE ENTREPRISE ÉVOLUE.»

Nous avons donc changé le discours de produit à un celui d’expériences et d’émotions chez les gens de BRP. Je dis toujours que BRP, c’est «un adolescent avec une vieille âme». Nous n’avons que 14 ans d’existence, mais nous traînons avec nous tout l’héritage de marques iconiques comme Ski Doo, Sea Doo et Can-Am. La force de BRP a toujours été la qualité du produit. Notez que l’ancienneté moyenne des employés ici est de 20 ans! Lorsqu’on veut faire une transformation à l’intérieur d’une culture tellement enracinée… c’est loin d’être évident.

Quelles ont été les étapes de ce départ vers l’univers numérique?

La première chose a été de définir quelle était la raison d’être de BRP, de même que le cadre de la marque, ce qui n’avait jamais été fait. Nous avons ainsi déterminé la promesse de marque, notre positionnement et le ton que nous voulions utiliser. Ensuite, nous avons tenté de trouver de quelle façon cela allait changer la culture de l’entreprise et nos valeurs. La transformation était profonde. Ce n’était pas juste de dire qu’on faisait une transformation numérique: celle-ci commence dans le cœur de l’entreprise. Le numérique, au final, ce n’est qu’une des expressions de la façon dont une entreprise évolue.

«POUR CE QUI EST DE LA RECONNAISSANCE DE LA MARQUE, DE SA NOTORIÉTÉ, JE CROIS SINCÈREMENT QUE LES MÉDIAS TRADITIONNELS NE SONT PLUS NÉCESSAIRES.»

Dans la gestion du changement, nous aussi avons puisé à même la culture de BRP, ce qui a aidé à la mobilisation. Plusieurs employés ici sont des riders (j’utilise leur langage), et quand ils reviennent de leurs rides, ils ne parlent pas de la technologie des produits, mais ils se racontent plutôt des anecdotes, les expériences qu’ils ont vécues. J’ai tout simplement mis un mégaphone sur quelque chose déjà très présent.

La personnalisation des approches de marketing est de plus en plus essentielle pour les entreprises. Quelle stratégie BRP entend prendre pour atteindre plus personnellement les consommateurs? 

Je disais qu’on devait bâtir le dernier mille, car on doit aller chercher et comprendre qui sont nos consommateurs. C’est ce que nous sommes en train de développer avec nos nouveaux talents et nouveaux systèmes, et nous changeons complètement la nature de la relation avec le consommateur, d’une relation de dire à une relation d’écoute. Jusqu’à dernièrement, l’on disait: «Vous allez adorer nos machines, voici pourquoi…». Maintenant, nous écoutons le consommateur et nous avons une dynamique dans laquelle nous répondons à ses questions. Un peu comme tout le monde: beaucoup moins de médias traditionnels et plus d’expérientiel. On organise aussi beaucoup d’événements et des tournées où l’on peut aller parler directement avec le consommateur et faire tester nos produits. On a plein d’ambassadeurs. Les gens font des sacrifices importants dans leur vie pour se permettre d’acheter l’un de nos produits parce qu’ils veulent aller rider. On ne laisse pas assez les personnes raconter leurs histoires et leurs expériences.

On essaie d’aller dans des endroits où l’on peut se rapprocher de nos clients potentiels, car nous croyons sincèrement qu’une fois que le consommateur aura essayé l’un de nos produits, il voudra le réutiliser. D’où l’idée de réaliser des tournées de démonstration pour donner accès le plus possible à nos produits.

Est-ce que les grandes campagnes dans les médias traditionnels sont amenées à disparaître?

Si l’on parle en matière d’entonnoir de marketing, donc, on parle des étapes, de la reconnaissance d’une marque jusqu’à la vente du produit, selon moi, les médias traditionnels vont toujours être employés peut-être sur le plan du bas de l’entonnoir, donc, au chapitre de la vente. Quand j’ai besoin de mener une promotion, par exemple, il y a une nécessité à ce moment d’être plus unidirectionnel, parce que je veux informer le consommateur et non avoir une discussion avec lui. Mais pour ce qui est de la reconnaissance de la marque, de sa notoriété, je crois sincèrement que ces médias ne sont plus nécessaires.

Où aimeriez-vous en être dans cinq ans?

Comme je l’ai mentionné plus tôt, mon rêve serait que des plateformes tellement conviviales aient été mises en place, de sorte que les consommateurs puissent raconter aux autres leurs expériences, et que la notoriété de la marque se construise de façon organique par eux. Dès lors, j’aimerais passer tout mon temps à faire du marketing contextuel, c’est-à-dire à mettre l’accent sur le marché australien, par exemple, pour comprendre celui-ci et y mener des tests. N’oublions pas que nous sommes présents dans 112 pays. J’aimerais que mon équipe et moi passions notre temps à aller réaliser des projets très ciblés pour développer une compréhension de marchés spécifiques.

SOURCE: INFOPRESSE 

Identité visuelle: Gauthier
Photo: FH Studio – Christian Blais
Maquillage: Éloïse Bourbeau

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