Domtar montre « pâte blanche »

Domtar montre « pâte blanche »

Cet article d’un de nos membres, DOMTAR, était passé sous le radar.  Brillamment écrit par le journaliste indépendant Guillaume Roy, voici donc cet article que nous partageons sur notre site afin de le conserver précieusement.

Géant papetier, Domtar évolue dans une industrie en déclin où les perspectives semblent toujours s’assombrir. Mais alors que le pessimisme en aurait gagné plusieurs, la multinationale a trouvé des occasions favorables grâce à la lutte contre les changements climatiques.

Dans une perspective de développement durable et pour s’adapter à la nouvelle réalité liée à la Bourse du carbone, Domtar a réduit ses émissions de gaz à effet de serre (GES) de 35 % depuis 2011. Pendant ce temps, le géant papetier a aussi décidé de donner de la valeur aux déchets en valorisant désormais 92 % de ses résidus. Est-ce que la lutte contre le carbone peut sauver le papier?

(photos sur le site de l’auteur ICI)

L’usine Domtar de Windsor est un poumon économique dans la région. (© Guillaume Roy / Unpointcinq)

En arrivant sur le site de l’usine de Domtar, à Windsor, on voit tout de suite l’importance de l’entreprise pour la petite ville des Cantons-de-l’Est. À lui seul, le géant papetier emploie 850 personnes dans la municipalité qui compte 5 400 âmes. Avec les sous-traitants, le nombre d’emplois indirects grimpe même jusqu’à 4 000.

Mais est-il possible d’entrevoir un avenir radieux dans une industrie du papier en déclin? Comment se démarquer alors que la consommation de papier fin a diminué de 50 % depuis 2000? Pour Domtar, une partie de la réponse se trouve dans la lutte contre les changements climatiques et dans l’économie circulaire.

Le plan : réduire son empreinte carbone tout en créant des occasions d’affaires avec ses déchets.

Des choix payants

Pour Domtar, l’opération carbone a été facilitée en 2009 quand le gouvernement canadien a lancé le programme d’écologisation des pâtes et papiers, investissant 1 milliard de dollars pour l’amélioration de la performance environnementale des usines canadiennes de pâtes et papiers. « Nous avons alors mis en place un vaste programme de récupération de la vapeur dans l’usine, pour réduire au minimum l’utilisation des chaudières au gaz naturel », explique Patsy Inglis, chef de service, environnement et procédés, chez Domtar.

 » Il a aussi fallu changer la mentalité des employés pour réduire au minimum l’utilisation des chaudières alimentées au gaz naturel

Michel Lemieux

Pendant ce temps, des turbines à vapeur ont été remplacées par des moteurs électriques, réduisant davantage la consommation de gaz naturel. Pour produire la vapeur nécessaire aux procédés industriels dans l’usine, Domtar a alors optimisé sa production. « Nous avons amélioré l’alimentation en biomasse dans la chaudière pour la rendre plus homogène », ajoute Mme Inglis.

« Il a aussi fallu changer la mentalité des employés pour réduire au minimum l’utilisation des chaudières alimentées au gaz naturel », mentionne Michel Lemieux, directeur santé et sécurité, environnement et investissements stratégiques. « On veut utiliser ces chaudières seulement en dernier recours », confie-t-il.

Une nouvelle turbine-alternateur de 18 MW fonctionnant à la biomasse est entrée en fonction à la fin du mois de septembre dernier. (© Guillaume Roy / Unpointcinq)

Et l’effort carbone a été payant. De 2011 à 2017, les émissions de GES sont passées de 100 000 tonnes à 65 000 tonnes par an. Une réduction suffisante pour répondre aux exigences de la Bourse du carbone jusqu’en 2020. « À compter de 2020, il faudra commencer à utiliser les crédits carbone que l’on a en banque. Si on ne trouve pas d’autres sources de réduction, il faudra acheter des crédits lorsque ceux-ci seront épuisés », note Michel Lemieux.

Depuis 1991, une entreprise de production de carbonate de calcium, située sur le site de Windsor, récupère près de 20 % des gaz de combustion pour transformer le CO2 en carbonate de calcium (CaCO3), un produit qui est réutilisé par Domtar pour améliorer l’opacité et les propriétés optiques du papier.

Cette capture de carbone ne peut toutefois pas être comptabilisée dans les crédits carbone, car la biomasse est considérée comme ayant un bilan carbone neutre au Canada. Pour continuer à réduire ses émissions de GES, le géant papetier devra maintenant être très imaginatif, car il n’existe plus de sources d’émissions faciles à réduire.

Dans le cadre d’une réflexion sur l’avenir de l’entreprise, dénommée Vision 2030, plusieurs projets innovants sont à l’étude. « On regarde déjà pour des projets qui nécessiteraient plus d’investissement, comme la capture et la valorisation du carbone, souligne Michel Lemieux. On s’intéresse aussi à transformer la biomasse en gaz naturel renouvelable. »

L’implantation d’énergie solaire est aussi évaluée.

Déchets en or

Au cours des cinq dernières années, Domtar s’est aussi attaquée à l’autre importante source de GES : son site à résidus. Dans le passé, les boues papetières, un résidu issu du procédé de confection du papier, étaient enfouies avec les écorces, générant d’importantes quantités de méthane lors de la décomposition. « Si on ne faisait rien, notre site à résidus, indispensable au fonctionnement de Domtar, aurait été rempli en quatre ans », note Michel Lemieux.

C’est pourquoi la papetière a décidé d’entreprendre un important virage vers l’économie circulaire. Selon le concept d’économie circulaire, les résidus n’existent pas (ou presque), car ils peuvent être valorisés quelque part dans la chaîne de production ou chez un partenaire externe. En d’autres termes, l’idée est de transformer les déchets en ressources.

Il y a cinq ans, Domtar valorisait déjà 40 % de ses résidus et ce taux atteint désormais 92 %.

Que s’est-il passé? Domtar a décidé de valoriser les boues papetières en les utilisant pour fertiliser ses plantations de peupliers hybrides. Résultat : les arbres poussent beaucoup plus vite et ils peuvent être récoltés après seulement 15 ans de maturation! Les cendres sont aussi utilisées pour fertiliser les érablières. Les écorces qui étaient jadis enfouies et le bois de palette, qui est aujourd’hui broyé, sont utilisés comme source d’énergie pour produire de l’électricité dans une des deux turbines à vapeur de Domtar (une deuxième turbine a été inaugurée à l’automne 2017 pour produire 50 mW d’énergie renouvelable au total).

L’économie circulaire s’est avérée un choix payant d’un point de vue économique et environnemental, mais aussi pour l’attraction d’une main-d’œuvre qualifiée, remarque Michel Lemieux. « Nos clients veulent notre papier, car ils savent qu’on a de bonnes pratiques. Les gens savent qu’on est très proactifs du côté environnemental, ce qui attire beaucoup les jeunes. »

photo sur le site de l’auteur ICI 
Vincent Pomerleau, ingénieur responsable du projet, et Michel Lemieux, directeur santé et sécurité, environnement et investissements stratégiques chez Domtar. (© Guillaume Roy / Unpointcinq)

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